Dans quelques jours sera inauguré par les plus hautes autorités gabonaises à Libreville, le Centre de protection et de promotion sociale pour la prise en charge des femmes victimes de violences. En prélude à cette énième œuvre, preuve de l’engagement de nos autorités dans la lutte contre les violences faites aux femmes dans notre pays et à travers le monde, la Première Dame du Gabon, Sylvia Bongo Ondimba, a accordé une interview exclusive au quotidien national l’Union, dont nous vous livrons le contenu.
1- Le 1er septembre 2022 à Libreville, le gouvernement a entériné un projet de décret pour la création d’un centre de protection et de promotion sociale pour la prise en charge des femmes victimes de violences. Le centre d’accueil ouvrira ses portes dans quelques jours. Peut-on parler de promesse tenue ? Que représente ce centre pour vous-même et pour les femmes qui y seront accueillies ?
Il est important que les engagements pris soient respectés. Il en va de la crédibilité de la parole publique et de la confiance que les Gabonaises et les Gabonais peuvent avoir vis-à-vis des institutions. Lors de la restitution officielle de la Stratégie Gabon Égalité en septembre 2020, le Président de la République, S.E.M Ali Bongo Ondimba, avait fermement instruit le Gouvernement de mettre en œuvre avec diligence les 33 mesures contenues dans le plan d’action. L’une des mesures-phares était ce centre d’accueil « Gabon Egalité » qui a pour vocation d’écouter, d’accompagner, d’héberger et de réinsérer les femmes victimes de violences. Les violences basées sur le genre constituent un véritable obstacle au développement socio-économique de notre pays. Grâce au dynamisme de la société civile, et avec le soutien des autorités gouvernementales, le Gabon a énormément progressé en matière de droits des femmes ces dix dernières années. Au point d’être reconnu aujourd’hui comme l’un des pays les plus protecteurs des droits des femmes en Afrique.
Mais pas question pour autant de nous reposer sur nos lauriers. Tel Sisyphe poussant continuellement son rocher, cet effort doit être poursuivi dans la durée et même intensifié. Il est aussi important, en ce domaine comme en d’autres, d’être concret. C’est pour ces raisons que nous avons proposé et obtenu la création de ce centre de protection et de promotion sociale pour la prise en charge des victimes de violences. A mes yeux, ce centre représente l’espoir pour les personnes qui y résideront. L’espoir de se reconstruire, physiquement et psychologiquement, et de rebâtir leur vie, sur les plans familial et professionnel, après des expériences de vie traumatisantes.
2-Avec un centre d’accueil Gabon Égalité, qu’est-ce qui change fondamentalement pour le Gabon ?
Au Gabon, nous faisons en sorte que les droits soient mieux respectés, que toutes les formes de violence régressent. Plus spécifiquement, en matière de lutte contre les violences faites aux femmes, le droit a énormément progressé. Les réformes législatives successives visent à prévenir ces violences en les dissuadant et à les sanctionner très sévèrement quand elles se produisent. Mais la réponse pénale, si elle est nécessaire, ne peut pas être la seule, ni même la principale. Il faut également et surtout s’occuper des victimes. Ce dont celles-ci ont besoin, c’est d’être accompagnées, y compris sur les plans psychologique, social et économique. En ce domaine, il faut se doter d’outils efficaces. C’est cette logique qui a présidé à la création du Centre Gabon Egalité.
3-Quelles vont être les capacités d’accueil de ce centre, quel personnel sera chargé de sa gestion, le dispositif général, ainsi que les structures et institutions partenaires pour la prise en charge des victimes ?
Pouvant héberger jusqu’à 90 victimes et 60 enfants, le Centre « Gabon Égalité » est placé sous la tutelle du Ministère de la Santé et des Affaires Sociales mais d’autres ministères interviennent pour la mise à disposition de certains services aux personnes victimes de violences. Le Centre a 4 vocations principales. Il se veut tout d’abord un lieu d’écoute pour les personnes victimes de violences. Il est également un lieu d’accueil, offrant un hébergement d’urgence pour les femmes en danger, et un hébergement plus long pour les femmes en réinsertion. Par ailleurs, avec la clinique juridique organisée par les agents de police du Ministère de l’Intérieur et les conseilleurs juridiques du Ministère de la Justice, le Centre propose aux victimes un soutien multiforme lors du dépôt de plainte, et les accompagne ensuite dans la préparation de leur projet de vie. Enfin, le Centre prépare les femmes à leur réinsertion à travers un programme de formation en collaboration avec la société civile et des organismes internationaux, ce qui leur permet de participer à des activités génératrices de revenus, et de bénéficier d’un suivi post-formation.
4-Quel bilan peut-on faire, à ce niveau, de la campagne “He For She” lancé en avril dernier ?
Le déploiement de la campagne He For She Gabon a eu pour objectif de faire participer les hommes gabonais au combat pour l’égalité des genres en les encourageant à prendre des mesures à chaque niveau de leur vie quotidienne et de la société contre les inégalités. La campagne He For She a permis d’accélérer la prise de conscience sur le fait que l’égalité des droits n’était pas uniquement un sujet de femmes. C’est un sujet de droits humains et les hommes, en tant que père, frère, voisin, collègue, ont leur rôle à jouer pour protéger et soutenir les droits des femmes dans la sphère familiale, civique ou professionnelle. Il faut le répéter, il faut le marteler. Il faut encourager les hommes à s’engager, comme l’ont fait à l’occasion de cette campagne des hommes politiques, chefs d’entreprises, et étudiants. Nous avons besoin de tout le monde.
5-Vous avez lancé récemment à Ntoum la caravane de sensibilisation du programme gouvernemental Gabon-Egalité, à cause de l’impact qu’il peut avoir sur la société. L’ouverture du centre d’accueil est l’occasion de revenir sur cette caravane. Quelles seront les prochaines étapes ?
Comme vous l’avez si bien dit, le Gabon ne se limite pas à sa capitale. Avec le Premier Ministre, Madame Rose Christiane Ossouka Raponda, nous avons décidé de lancer cette caravane afin d’échanger avec les communautés rurales et urbaines et de les sensibiliser sur les nouveaux droits dont elles disposent dans le cadre du programme Gabon Égalité. Dans les prochains mois, je sillonnerai, aux côtés de l’équipe gouvernementale, les autres provinces car il est important que la population comprenne que Gabon Égalité ne se limite pas à Libreville mais couvre l’entièreté du pays.
6-Grâce au programme gouvernemental Gabon-Egalité, on note un grand nombre d’innovations en faveur des femmes dans les secteurs de la santé, de l’Éducation, de l’économie. Et, des réajustements du code civil, l’adoption des nouvelles lois. Doit-on s’attendre à d’autres projets pour atténuer ces violences ?
La lutte contre les violences basées sur le genre et surtout la promotion de l’égalité des genres est un combat de tous les jours. A ce stade, notre priorité n’est pas d’amener de nouveaux projets mais plutôt de pérenniser les droits nouvellement acquis et les réformes structurelles entreprises depuis la publication de la Stratégie Gabon Égalité. Car, comme disait Simone de Beauvoir, « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant ». Nous avons entamé, avec fougue et détermination, cette marche vers l’égalité. Mais ces progrès ne sont pas inéluctables. Nous avons le devoir de protéger ces acquis pour les générations futures. Et, à ce titre, je compte sur les acteurs de la société civile pour continuer à remplir leur rôle de gardien des droits et de garde-fou démocratique.
7-La troisième édition, le Prix Agathe Okumba d’Okwatsegue cette année s’est portée sur la promotion de l’égalité des genres en milieu scolaire. Pourquoi le choix de ce thème et quel bilan en tirez-vous ?
Il est important d’inculquer la valeur de l’égalité des genres dès le plus jeune âge. C’est souvent à l’école que les premières discriminations apparaissent. Pour les jeunes filles, cela se traduit souvent par le fait qu’on leur dit ou qu’on leur laisse penser qu’elles sont inférieures aux garçons, qu’elles n’ont pas les mêmes capacités, ou encore qu’elles ne peuvent occuper les mêmes places dans la vie sociale ou professionnelle. Ces idées reçues, qui sont le produit à la fois d’une longue histoire et de contingences, il faut les déconstruire.
Par ailleurs, on constate ces dernières années une augmentation des violences en milieu scolaire. Qu’elles soient de nature sexuelle, verbale, physique, psychologique ou économique, ces violences sont la source d’innombrables inégalités qui risquent de mettre en péril l’avenir de nos enfants. Nous avons le devoir de trouver des réponses adaptées et pérennes à ces problématiques. Il en va de l’intérêt des jeunes filles et des futures femmes. Mais pas uniquement. Comme le rappelle souvent le Président de la République, l’égalité des genres bénéficient à toute la société car les meilleurs ne sont plus seulement recrutés sur la base du genre, soit 50 % de la population, mais de leurs compétences exclusivement. C’est pourquoi nous avons mis en avant la promotion de l’égalité des genres en milieu scolaire à l’occasion de la troisième édition du Prix Agathe Okumba d’Okwatsegue qui vient d’être décerné.
Source: l’Union
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