En début mars, Libreville sera la capitale mondiale d’une rencontre de haut niveau en rapport avec la protection de l’environnement et de la biodiversité nommée le One Forest Summit, que la France coorganise avec le Gabon.À cet effet, plusieurs Chefs d’Etat sont attendus dès le 01er mars prochain à Libreville.Selon les informations de notre confrère Jeune Afrique, ils seraient au nombre de 10 Chefs d’Etat.
À savoir: Ali Bongo Ondimba du Gabon (pays hôte); Emmanuel MACRON ( France); Denis Sassou Nguesso (Congo), João Lourenço (Angola), Félix Tshisekedi (Congo), de l’Équato-Guinéen Teodoro Obiang Nguema Mbasogo (Guinée Équatoriale), Mahamat Idriss Déby Itno (Tchad); Paul Kagame (Rwanda); Évariste Ndayishimiye ( Burundi) et Manuel Pinto da Costa ( Sao-Tomé et Principe).
Jeune Afrique dévoile qu’il y aurait également des invités:
Olaf Scholz, le chancelier allemand, en tant que facilitateur de la PFBC ; Jonas Gahr Støre, le Premier ministre norvégien, dont le pays est un gros bailleur de fonds du partenariat, ainsi qu’Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission de l’Union européenne.La Grande-Bretagne sera elle aussi représentée, les organisateurs du sommet ayant notamment sollicité une intervention par visio-conférence du roi Charles III.
Pourquoi un Sommet sur les forêts ?
Comme annoncé par le Président de la République gabonaise Ali Bongo Ondimba et le Président de la République française Emmanuel Macron lors de la COP27 en novembre 2022 à Charm el-Cheikh, un One Forest Summit sera organisé les 1 er et 2 mars 2023 à Libreville au Gabon. Ce sommet sera un moment clé pour avancer sur l’action climatique et la préservation de la biodiversité, en promouvant la solidarité entre les trois grands bassins forestiers à l’échelle mondiale : la forêt amazonienne, le bassin du Congo et les forêts tropicales d’Asie du Sud Est. La protection de ces trois bassins forestiers constitue un enjeu mondial. En séquestrant des millions de tonnes de CO2 1 , ces bassins forestiers jouent un rôle critique dans la régulation du climat. Par la faune et la flore exceptionnelles qu’ils recèlent, ils abritent des trésors de biodiversité. Et en agissant comme tampons entre les sociétés humaines et les cycles microbiens des espaces sauvages, ils jouent un rôle clé pour prévenir l’apparition de nouvelles épidémies.
Pourquoi un Sommet au Gabon ?
Le Gabon, pays dont le territoire est recouvert à 88 % par la forêt équatoriale, l’un des deux principaux poumons verts de la planète, est en première ligne dans la lutte contre le réchauffement climatique et la protection de la biodiversité, très tôt hissées au rang de priorités au niveau national. Précurseur, le Gabon s’est aussi engagé volontairement à protéger un tiers de ses espaces naturels, terrestres comme marins. Se préparant depuis plus d’une décennie à l’après-pétrole, le Gabon a adopté un modèle économique alliant développement industriel et gestion durable de ses ressources naturelles, comme le montre l’exploitation du bois dont le Gabon est l’un des principaux producteurs mondiaux.
Quels seront les objectifs et les avancées concrètes lors de ce Sommet ?
Ce Sommet, qui rassemblera des chefs d’Etat et des ministres des trois continents, permettra d’aborder les enjeux liés à la préservation des trois grands bassins forestiers, au lendemain de l’accord historique obtenu à Montréal sur la protection de la biodiversité. On oppose parfois la protection des forêts et le développement économique des pays forestiers, qui pour beaucoup d’entre eux sont par ailleurs soumis à une forte pression démographique.
Le but du Sommet est de démontrer que les deux objectifs sont conciliables : gérer de manière durable une forêt permet à la fois de préserver les services écosystémiques rendus à l’humanité et d’augmenter sa valeur ajoutée économique pour les pays forestiers et les populations locales. Concrètement, le One Forest Summit de Libreville n’aura pas pour objectif de faire adopter de nouvelles déclarations politiques.
Le cadre ambitieux, nous l’avons déjà : c’est celui fixé à Glasgow, puis à Montréal lors de la COP15. L’enjeu sera de mettre en application cette ambition en proposant aux pays forestiers, avec l’aide de nombreux scientifiques, chefs d’entreprises, investisseurs et ONG, une plateforme de solutions scientifiques et économiques pour les aider à concilier protection de leurs forêts et développement économique.Le premier objectif sera de donner aux grands pays forestiers des solutions très concrètes pour leur permettre de tirer des bénéfices économiques de politiques plus protectrices des forêts : En développant des filières plus durables pour des produits qui seront vendus plus chers sur les marchés internationaux et profiteront davantage aux populations locales. De telles filières existent déjà : c’est le cas pour le bois à des fins de construction et de rénovation des bâtiments, qui constitue une solution innovante pour réduire l’emprunte carbone de nos infrastructures.
Les produits alimentaires issus d’agroforesterie et autres pratiques responsables jouissent également d’un fort potentiel : café, cacao, caoutchouc, etc. Le défi est de soutenir ces filières pour accompagner leur passage à l’échelle, et stimuler la demande pour ces produits ou matériaux, en cohérence notamment avec la nouvelle politique européenne de lutte contre la déforestation importée. Un forum économique pour les forêts sera organisé à Libreville pour accélérer le développement de ces filières, grâce à du partage de savoir-faire, de la formation et des nouvelles opportunités de partenariats économiques. En rémunérant les pays qui reforestent et augmentent ainsi les capacités de séquestration de leurs forêts. Les acteurs privés ont à cet égard un rôle majeur à jouer à travers ce qu’on appelle les « crédits carbone » : concrètement, une entreprise qui souhaite contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique pourra investir dans des projets qui permettent d’augmenter les capacités de séquestration nette de la forêt, à travers par exemple des projets de restauration des terres ou de reforestation. Afin d’éviter tout green washing, nous allons rassembler les acteurs à Libreville qui sont engagés dans le segment de ce marché qui présente le plus d’intégrité environnementale, et qui rapporte ainsi le plus aux pays forestiers (avec des projets à haut rendements, certains dépassant 30$ la tonne de C0²).
Enfin, certaines zones de la forêt sont encore intactes et représentent des réserves vitales de carbone ou de biodiversité (par exemple les mangroves), qu’il faut protéger dans le cadre de parcs ou de réserves de biosphères. Le sommet de Libreville permettra là aussi de lancer des mécanismes innovants pour financer ces zones protégées, à travers des partenariats de conservation positives (PCP), suite à l’initiative lancée par la France et le Fonds pour l’environnement mondial en marge de la COP27 à Charm el- Cheikh.Le second objectif de ce Sommet sera de renforcer la coopération scientifique entre les trois grands bassins tropicaux du monde, notamment pour accroître l’expertise internationale sur les services rendus par les forêts. Seront explorés les liens entre biodiversité et santé (à travers l’initiative PREZODE), les pratiques traditionnelles qui permettent de protéger les espèces les plus endémiques, mais aussi de mieux cartographier ces espaces, dont les richesses restent mal connues. Comme pour les fonds marins, si nous voulons mieux protéger, il faut avant tout mieux connaitre.
Enfin, en l’organisant à Libreville, l’objectif de ce Sommet sera aussi de valoriser l’apport des forêts africaines, largement méconnu du grand public, quelques mois avant le sommet sur l’Amazonie qui devrait être organisé par le Brésil et la Colombie. Le bassin forestier du Congo-Ogooué est un poumon extraordinaire pour la planète. Parmi les trois grands bassins forestiers, il est celui dont le taux de séquestration nette de C0² le plus important.Reprenant l’esprit des One Planet Summit, ce Sommet ne réunira pas seulement les représentants des Etats de tous les continents et des organisations internationales, mais aussi des entreprises et investisseurs, des associations, des scientifiques et experts, des collectivités locales. Cette pluralité d’acteurs fait la force des sommets One Planet.
Elle permet de mobiliser les ressources du secteur privé pour la transition écologique, et de faire évoluer les pratiques à tous les niveaux.Le One Forest Summit de Libreville ne sera pas un sommet de plus. Il sera un sommet utile pour l’action, la mise en application à grande échelle de certaines décisions vitales pour l’avenir de notre planète.
Herton-séna Omoungou
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