Le tribunal de Première instance de Libreville a émis, via une ordonnance, une jurisprudence qui permet à la femme mariée de saisir la justice lorsque son époux veut contracter un mariage à la coutume avec son amante. Une décision qui intervient visiblement pour recadrer les comportements irréguliers de beaucoup d’hommes mariés qui mettent en péril la cohésion familiale de leur foyer.
Le phénomène des hommes mariés à l’état-civil et qui épousent d’autres femmes à la coutume a longtemps été décrié dans la société gabonaise. Notamment par les épouses, qui se sentaient ainsi lésées. C’est le cas de Philomène, 43 ans et mère de cinq enfants : «Je suis une de ces femmes victimes de la méchanceté de mon mari. Il nous a abandonné les enfants et moi, depuis bientôt 5 ans, pour une autre femme. Dernièrement, nous avons appris qu’il a doté la femme en question. Car, il ne peut pas l’épouser à l’état-civil, vu que nous sommes toujours mariés au régime monogamique. Vraiment, je bénis Dieu pour la décision que vient de prendre le tribunal. Cette ordonnance-là, vient sonner la fin de la récréation de ces hommes malhonnêtes».
Comme, Philomène, plusieurs femmes ont souffert de cette réalité qui perturbe, à les croire, l’équilibre des familles. Jugeant d’une problématique similaire, le tribunal de Première instance de Libreville a pris une ordonnance qui permet à la femme mariée de saisir la justice, lorsque son époux veut contracter un mariage à la coutume avec son «deuxième bureau».
Selon la présidente de la plate-forme associative le «Salon de la femme», par ailleurs magistrat, Sidonie Flore Ouwe, cette décision est donc une jurisprudence de principe sur laquelle les femmes devraient désormais s’appuyer, pour pouvoir canaliser tous les comportements déviants qui foulent au pied les règles de l’institution du mariage.
«Cette décision permet à la femme mariée, sous le régime monogamique, d’empêcher à son époux de célébrer un mariage coutumier avec une autre femme, alors que leur mariage n’a pas encore été dissout. C’est une ordonnance qui vient asseoir le pouvoir de la femme, même si le couple est en instance de divorce. Car, comment comprendre qu’une institution comme le mariage, l’un des époux puisse fouler au pied les principes de celui-ci, sans en être inquiété», s’est-elle questionné.
Les femmes mariées sous l’option polygamique ne sont pas moins protégées. En effet, Mme Ouwé a souligné que cette disposition judiciaire les protège aussi. Car, pour que l’époux prenne une nouvelle femme, il doit avoir le consentement de sa ou ses premières épouses. Ainsi, l’option polygamique n’enlève en rien le pouvoir des premières épouses. Par ailleurs, elle précise que l’homme marié sous le régime polygamique, peut être traduit en examen au tribunal correctionnel, pour avoir contracté une union avec une autre femme non marié. «C’est un adultère», a-t-elle précisé.
Rappelons que cette décision du tribunal est fondée sur trois critères principaux, à savoir : la préservation de l’institution du mariage, le projet de s’unir sur le plan traditionnel avec une autre femme, sachant qu’on est déjà marié, ce qui vient perturber la cohésion familiale ; et l’illusion du mariage que l’homme fait naître dans la conscience de la nouvelle épouse, alors que cette union ne lui donne (pour l’instant) aucune garantie.
Les femmes mariées, pour avoir gain de cause, n’auront qu’à fournir les pièces suivantes : un acte de mariage, un procès-verbal (PV), dressé par un huissier de justice qui constate la relation irrégulière et continue, entre le mari et sa maîtresse, et des éléments qui attestent que le mariage aura lieu, notamment des témoins… Si une jurisprudence vient sonner le glas des dérives des hommes mariés, il est, également, temps que le parlement se prononce sur la proposition de loi, portant légalisation du mariage coutumier au Gabon.
Avec l’Agence Gabonaise de Presse
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